Journal Montréal Canada octobre 1976
(à l’occasion de l’exposition Amado à la Galerie Jeanne Bucher, Paris), Francine Vigneau : « La sculpture des couches souterraines » :
- Amado, comment en êtes-vous arrivé à créer votre propre matériau ?
- Et bien vous le savez, j’ai commencé par la céramique, mais j’ai eu très vite envie de faire du monumental. L’occasion m’a été donnée par Fernand Pouillon en 1954 à Alger quand il a fait ses chantiers. Pour une tour de dix-huit étages qui avait 40 mètres de haut. J’ai réalisé, avec ma première femme qui est morte maintenant, une sculpture de 40 mètres de haut et de 6 de large en terre cuite qui était un assemblage de milliers de morceaux. À ce moment là je me suis aperçu que la terre cuite ne se prêtait pas à des réalisations de cet ordre et j’ai trouvé ce béton que j’ai pratiquement inventé et que j’ai fait breveter pour des fabrications industrielles, pour pouvoir émailler des grandes surfaces ou réaliser des éléments constitutifs de l’architecture, entre autres des dalles qui avaient presque un mètre carré…
- Mais quand on regarde vos sculptures, on a l’impression que vous avez taillé dans le roc !
- Ce n’est pas taillé, c’est modelé, un peu comme on travaille des châteaux de sable sur la plage. C’est une gâchée qui est très plastique et très étudiée pour l’avoir bien en mains. En fait c’est comme si on montait des éléments en argile, avec cette différence que la prise du béton est très rapide, vingt minutes, et dès que la première prise est faite je retravaille à l’outil pour faire ressortir les détails. Le béton est encore souple mais je ne peux ni enlever, ni rajouter ; je peux seulement gratter, c’est un avantage parce qu’on n’a pas le temps de pinailler.